samedi 8 novembre 2014






Même les souvenirs sont infidèles.  Surtout les souvenirs sont infidèles.  Par notre faute.  On les colore, on les grossit, on les partage, on les embellit, on les modifie...  Involontairement.  Inconsciemment.  Ou par besoin.  Parce qu'il y en a qui sont trop douloureux.  Ceux-là, on les efface, même.  Et il y en a d'autres si précieux qu'on se les répète à l'infini parce qu'on ne veut pas les oublier, mais chaque visionnement en rajoute ou en enlève.

Moi je revisite beaucoup mes souvenirs.  Je les chéris.  Je leur accorde sans doute trop d'importance.  Je ne vis pas dans le passé, je vis dans mes souvenirs.  À travers eux.  Ils me constituent.  Je m'endors en m'imaginant ou en me souvenant.  Dans ma tête, je crée du futur et de la fiction, ou je ressasse des instants.  Des épisodes.  Bien souvent, je préfère mes souvenirs au présent.  Je m'y accroche.  Parfois, ça m'empêche d'avancer.  J'oublie que si je vivais, là, dans le moment, j'aurais plein de nouvelles images à garder.  Mais les vieilles pensées doivent laisser leur place aux plus récentes.  Comment tout conserver?  Comment trier?  Entre ce qu'il y a à jeter et ce qu'il y a à tenir tout près.  Ce qui n'a plus d'importance et ce qui est primordial.

Il existe des souvenirs qui méritent d'être oubliés.  Et d'autres qui peuvent servir de leçon, si on se montre réceptif.  J'aime bien l'idée que toute notre vie défile devant nos yeux les minutes précédant notre mort.  Pas pour l'aspect d'un bilan ou d'un constat.  Plutôt comme la projection d'un film.  On en ressort déçu, amusé, triste, fasciné, amer, contemplatif, abasourdi, confus, interdit.  Ou un peu de tout ça.  Mais jamais indifférent, ça je ne crois pas.

Les souvenirs nous collent à la peau, comme les tatouages, et peuvent laisser des cicatrices.  Ils font partie de nos empreintes.  Ils nous suivent, car personne ne peut vraiment se promener sans son lot de flashbacks, sans son bagage.  C'est indissociable de nous.  Je compare ça à une carte géographique, à une chronologie que l'on traîne.  Il peut y avoir quelque chose de rassurant là-dedans, ou, à l'opposé, embêtant.  On peut se souvenir d'avoir posé tel geste, telle action.  On se souvient pourquoi on a ri, pourquoi on a pleuré, ou on se le demande encore.  Celui ou celle qu'on a incarné dans ces souvenirs peut nous déboussoler.

J'aime me souvenir.  Ça me prouve que j'ai vécu.  Et je suis chanceuse, j'ai de bons souvenirs.  Même s'ils évoquent des choses perdues ou des époques révolues.  Avec le recul, j'arrive à rire de presque tout.  Presque.








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